Le 24 février 2022, l’armée russe a envahi l’Ukraine.

Cette guerre est atrocement réelle, avec ses combats, ses crimes, ses morts et ses blessés, avec ses populations en fuite.

Cette guerre est européenne. Elle se livre au centre géographique de notre continent, aux portes de l’Union européenne.

Cette guerre est la folie d’un homme déterminé à réécrire l’Histoire.

Cette guerre est illégale, conduite en violation de toutes les règles du droit international et après le rejet d’initiatives de paix.

Cette guerre est impériale, visant la disparition d’un Etat et à en vassaliser le territoire.

Cette guerre est déclarée contre l’expansion de la démocratie libérale, pour empêcher l’Ukraine d’en prendre le chemin. 

L’Union européenne la condamne toute entière et la combat. Depuis la première heure de l’offensive, les Vingt-Sept ont montré à Vladimir Poutine qu’il ne saurait les diviser. Au contraire. Les sanctions à l’encontre de personnalités et entités russes ont été étendues et renforcées. Les pays du G7 et l’UE ont décidé de bloquer les opérations de la banque centrale russe sur leur sol, restreignant fortement ses capacités de convertir ses réserves de change. L’espace aérien européen est fermé aux avions russes. Deux chaînes de propagande sont interdites de diffusion pour lutter contre la désinformation.

Mais la réponse européenne dépasse la seule politique des sanctions. Sous l’impulsion de la Présidence française du Conseil, l’Union progresse sur le chemin de la puissance. Pour la première fois de son histoire, l’Europe a décidé d’envoyer du matériel de guerre à un pays tiers. Des munitions, des armements et autres types de renforts vont être fournis à l’armée ukrainienne. Tous les Etats membres participent à cet effort inédit, que coordonne l’UE et qui mobilise un fonds européen. De nombreux Etats apportent un soutien supplémentaire, dont l’Allemagne qui opère ainsi un tournant dans son approche des conflits et l’Europe avec elle.

L’UE se mobilise aussi pour l’accueil des Ukrainiens. Les Vingt-Sept accordent une protection temporaire immédiate dont bénéficient des millions d’Ukrainiens fuyant les combats. Le recours à ce régime de protection exceptionnelle est inédit. Il méritera d’être considéré pour d’autres conflits.

Cette guerre exige notre unité, notre fermeté, notre réactivité et notre créativité. Elle aura un coût économique et social. Un plan européen doit en répartir et étaler l’effort. 

Et préparer l’avenir. Cette guerre, qui se déroule là où l’Europe n’a pas été construite, appelle à penser dès maintenant l’après-guerre.

Le défi est d’abord énergétique. Nous disposons d’une panoplie de moyens pour ne plus dépendre des énergies fossiles, qui procurent une rente au régime russe actuel. La décarbonation de nos économies à accélérer est un impératif climatique mais aussi géopolitique.

Le défi est sécuritaire. A la faveur de l’unité retrouvée de l’Otan dans cette guerre, c’est l’architecture européenne de sécurité qu’il nous faut repenser, comme y appelle le président Macron.

Le défi est européen. Il nous invite à répondre aux aspirations européennes qu’exprime l’Ukraine. Il nous oblige aussi à préparer une nouvelle relation avec la Russie, qui s’adresse et bénéficie directement à son peuple. Une nouvelle aire de coopération reste à imaginer avec cette vaste partie de notre continent. Pour construire, comme la nomme Jacques Delors, la grande Europe.

Sébastien MAILLARD, Directeur de l’Institut  Jacques Delors