La situation des entreprises post covid et les défis qui attendent les banques

Une crise sanitaire qui oblige à arrêter les activités économiques et qui conduit les pouvoirs publics à mettre en place des dispositifs de soutien inédits, massifs, rapides pour les entreprises. Il s’en suit des prédictions de « fin du monde  » : un mur de la dette pour les entreprises, une explosion des défaillances, un système bancaire à genoux sous le poids des créances non performantes.

L’action déterminée des pouvoirs publics qui ont adapté les mesures de soutien au fur et à mesure de la crise, des chefs d’entreprises qui ont affronté cette crise avec détermination, résilience et des capacités d’adaptation, un système bancaire solide qui a continué à financer l’économie, autant d’éléments qui apportent des démentis criants aux chroniques d’une catastrophe annoncée.

Les entreprises ont été fortement affectées par la crise de la Covid avec des baisses d’activité prononcées lors du 1er confinement mais l’économie a montré une capacité de rebond exceptionnelle et les plus récentes prévisions économiques permettent d’escompter une croissance de la production intérieure de près de 6 % en 2021 et un retour désormais proche du niveau d’activité d’avant-crise.

Cette capacité des entreprises à rebondir ne doit pas occulter les difficultés de certains secteurs, plus lourdement affectés, ni les enjeux qui attendent beaucoup d’entreprises en sortie de crise avec un endettement accru.

Comme le souligne le rapport de l’Observatoire du financement des entreprises sur les fonds propres des TPE et PME1 , avant la crise de la Covid, les TPE et PME ont connu une amélioration globale de leur situation en fonds propres sous l’effet principalement d’une mise en réserve des résultats. Cette amélioration de la structure financière s’était notamment traduite par une diminution du taux d’endettement financier. Ainsi, si globalement les TPE et PME ont abordé la crise avec des situations en fonds propres renforcées, une proportion d’entre elles présentait des fragilités, le niveau de fonds propres étant un déterminant majeur du risque de défaillance.

L’analyse de la situation des PME à partir de la base FIBEN de la Banque de France2 montre que le chiffre d’affaires de ces entreprises a chuté de 5,2 % entre 2019 et 2020, la valeur ajoutée de 5,9 %. Les charges de personnel se sont ajustées à la baisse (- 4,9 %) grâce au dispositif d’activité partielle auquel elles ont largement souscrit. La baisse de l’excédent brut d’exploitation (EBE) est ainsi limitée à – 8,1 %. Dans l’ensemble, les PME ont plutôt bien résisté même si les secteurs n’ont pas été touchés de la même manière : la baisse du chiffre d’affaires est très marquée dans le secteur de l’hébergement et restauration (- 32,2 %) et, dans une moindre mesure, dans les services aux entreprises (- 8,7 %) et dans l’industrie (- 6,9 %) ; elle est plus limitée dans le secteur du commerce (- 2,1 %). En outre, ces disparités sectorielles cachent des situations très hétérogènes au sein d’un même secteur.

La dette des entreprises a certes augmenté puisque, sur l’ensemble des entreprises, la dette brute s’est accrue de plus de 200 milliards sur un an à fin décembre 2020 mais la dette nette n’a progressé que de 5 milliards, la différence se trouvant principalement en variation de trésorerie.

Une première analyse3 des 205 392 bilans reçus par la Banque de France permet de décomposer plus finement ces chiffres globalement rassurants : 6 à 7 % du total des entreprises cotées pourraient être confrontées à des difficultés lors de la levée des mesures d’accompagnement. Ce sont notamment ces entreprises qui devront être accompagnées dans le cadre du plan d’action sur l’accompagnement des entreprises en sortie de crise4 dont l’objectif est de détecter les fragilités financières, orienter les entreprises identifiées et leur proposer une palette de solutions.

La situation difficile de certaines entreprises devait plonger le système bancaire dans un gouffre de créances non performantes. Les résultats des stress tests réalisés par l’Autorité Bancaire Européenne5 montrent au contraire la capacité des banques de la zone euro à faire face à un scénario macroéconomique très dégradé. Mais surtout, les performances des banques, tant en 2020 qu’au 1er semestre 2021, montrent que le coût du risque reste correctement maîtrisé.

Cette situation favorable ne doit certainement pas conduire au relâchement, y compris dans la finalisation complète des réformes prudentielles (avec la transposition en Europe des règles de Bâle 3), mais elle donne aux banques la capacité à faire faire aux défis des années à venir : contribuer à la dynamique de la reprise économique, continuer de s’adapter à un environnement de taux bas, répondre au défi des nouveaux acteurs du secteur technologique, contribuer aux transitions numériques et énergétiques de l’économie.

La crise de la Covid a montré toute la capacité des entreprises et des banques face à un choc sans précédent. Cette résilience dans la crise est le meilleur gage de confiance pour le rebond et la transformation attendue de l’économie pour répondre aux futurs enjeux.

1/ Observatoire du financement des entreprises : les fonds propres des TPE et PME (mai 2021)

2/ Bloc-notes Eco de la Banque de France : Billet n°224 - Crise sanitaire, quel impact sur l’endettement des PME ?

3/ Bloc-notes Eco de la Banque de France : Billet n°219 - L’impact différencié de la crise sur la situation financière des entreprises

4/ Plan d’action sur l’accompagnement des entreprises en sortie de crise et La médiation du crédit est mobilisée pour sa mise en œuvre

5/ 2021 EU-wide stress test - July 2021

Frédéric VISNOVSKY, Médiateur national du crédit et secrétaire général adjoint de l’ACPR